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Mobilité dans le sanitaire et social : la fin des "trente glorieuses"

Publié par Admin sur 21 Novembre 2012, 07:41am

Catégories : #Infos

L'Observatoire de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale privée à but non lucratif (Bass) vient de rendre publique une intéressante étude décrivant la redéfinition des logiques d'orientation, de recrutement et de qualification en cours dans un secteur qui subit de plein fouet une rationalisation de ses moyens.
L'étude réalisée par l'Observatoire de la Bass est basée sur une enquête qualitative auprès de structures évoluant dans le secteur de la dépendance (personnes âgées, personnes handicapées) et de la protection de l'enfance, et implantées dans quatre régions (Franche-Comté, Rhône-Alpes, PACA et Languedoc-Roussillon). Au final, 30 directeurs d'établissement, presqu'autant de représentants du personnel, et 80 salariés – occupant un emploi d'aide-soignant, d'aide médico-psychologique, de moniteur-éducateur, d'éducateur spécialisé, d'éducateur technique spécialisé ou d'infirmier – ont fait l'objet d'un entretien semi-directif.
Cette étude s'attache à comprendre les mobilités survenues dans la vie professionnelle des personnes en milieu de carrière et en emploi dans une structure de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale privée à but non lucratif. Par mobilité, il faut entendre tous les changements survenus dans la vie professionnelle d'un même individu (changement de secteur d'activité, d'établissement, de fonction, de profession, de statut, chômage, inactivité, etc.), avec ou sans mobilité géographique.
Pour partielle qu'elle soit, cette enquête n'en permet pas moins de jeter un regard sur les logiques d'orientation, de recrutement et de qualification à l'oeuvre depuis une vingtaine d'années mais aussi sur la redéfinition en cours de ces logiques sous l'effet des mutations d'un secteur dont les modèles d'intervention et de financement se recomposent, notamment sous l'injonction de la puissance publique.

Les "trente glorieuses" 


Pour évoquer le "changement de paradigme" à l'oeuvre dans le secteur, l'Observatoire n'hésite pas à faire appel aux références historiques. Les différents types de mobilité étudiés dessinent ainsi le portrait d'un secteur qui vient de connaître ses "trente glorieuses". Durant ces trente dernières années, le secteur sanitaire et social "a en effet connu, à quelques inflexions près, une croissance forte et continue accompagnée d'une situation de plein emploi, voire de pénurie de main d'oeuvre". Contrastant avec le reste de l'économie française, le secteur sanitaire et social a ainsi pu offrir à des populations fragilisées et sans diplôme préalable "des possibilités d'accès à un emploi pérenne, à une qualification et à des perspectives de promotion professionnelle, à l'image de ce que les baby-boomers ont connu lors de leur entrée sur le marché du travail".

Exigence de qualification 


Viennent ensuite les années 90 et plus encore 2000, marquant vraisemblablement un premier tournant dont la balise pourrait être l'adoption de la loi 2002-2 qui rénove profondément le cadre d'intervention des établissements, dessine de plus en plus précisément des "normes", notamment en termes de qualification des équipes, normes qu'il convient toutefois d'articuler avec des contraintes financières grandissantes. Cette "normalisation" a accompagné et stimulé l'important mouvement de qualification des équipes, qui s'est traduit par un investissement considérable dans le financement des formations certifiantes du secteur, "tant du côté de la branche professionnelle dont les fonds mutualisés se sont presque entièrement consacrés à cet axe que des pouvoirs publics (État puis Régions) qui ont tout au long de ces deux décennies accru considérablement les places
de formation".

Le "choc pétrolier" 


Nous entrons enfin dans une troisième phase. « Tout laisse à penser au moment de l'étude, constatent les auteurs de l'enquête, que ces "trente glorieuses" sont en train de s'achever, la révision générale des politiques publiques [RGPP], la loi HPST et la réduction des déficits publics résonnant pour le secteur comme un "choc pétrolier" ». Des propos corroborés par plusieurs rapports qui relèvent qu'en 2010 et 2011, la croissance de l'emploi dans le secteur marque pour la première fois le pas. Partout, les associations se regroupent, voient leurs budgets rognés, des projets d'ouverture remis en cause : "la dynamique de recrutement semble stoppée même si les besoins dans le champ du handicap adulte et de la personne âgée, et le renouvellement démographique des professionnels maintiennent des possibilités d'embauche".

Rester attractif 


Alors que le secteur a pu apparaître comme une sorte "d'eldorado" professionnel, permettant l'intégration et la promotion de salariés peu qualifiés, les employeurs ont désormais de plus en plus de difficultés - pour des raisons financières et d'organisation - à proposer une formation certifiante en cours d'emploi. Ceux-ci semblent davantage attendre des candidats qu'ils aient acquis un diplôme en amont de la prise de poste. Un mouvement qui pourrait bien bousculer le modèle des trajectoires et mobilités à l'oeuvre jusqu'ici en déplaçant le moment de l'obtention de la qualification avant l'entrée dans le secteur.
Ce tournant ne dispense toutefois pas les employeurs du secteur d'une réflexion de fond sur l'attractivité de leurs établissements, quand bien même ils parviendraient à trouver des candidats qualifiés. Comme l'étude le laisse apparaître, la concurrence est rude entre structures ; elle porte certes sur les questions de statut et de convention collective, mais plus fortement encore sur les conditions de travail, les horaires et la pénibilité.
Ainsi, le secteur connaît-il aujourd'hui un changement d'ère qui va probablement redéfinir ses règles du jeu en matière de recrutement, de qualification et de mobilité professionnelle. La Branche non lucrative saura-t-elle inventer de nouveaux outils et de nouveaux partenariats pour conserver sa vocation intégratrice, sécurisante et promotionnelle à destination des personnes initialement peu qualifiées ? Cette étude "ne peut que l'encourager à ouvrir le débat", espère l'Observatoire.
Source : TSA
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